Je termine la saison en beauté avec Éloge des mousses, un ouvrage d’Olivier Liron, paru en avril 2025 aux éditions Payot & Rivages.

Dans le champ de l’écologie, de la nature, de la biodiversité, les récits formatés et prévisibles sont légion, et les voix singulières, rares. Celle-ci en est une. Le sujet n’était pas facile : une mousse, patron ! je sais, c’est facile… pas facile de tisser un récit sur ces minuscules plantes sans racines, qui boivent et mangent avec leurs feuilles !

J’ai rencontré Olivier au mois de juin dernier, à Lire à Limoges, un salon du livre où nous étions conviés avec Camille Brunel à une table ronde sur le thème Hymne au vivant. Animée par Caroline de Benedetti qui nous qualifiera par la suite de « pétillants » : « Les pétillants Camille Brunel, Christophe Gatineau et Olivier Liron. Avec eux, du débat dans les livres et du débat autour de la table. Inoubliable ! » Flatté… Champagne !

Camille, qui vient de publier Je est un animal chez Ulmer.

Quelle énergie !

J’ai été impressionné par ce gars, Olivier, à la fois bouillonnant et éloquent, qui nous embarque, nous amuse et nous retourne le bocal au risque de nous débarquer ! Oh non, il ne s’écoute pas parler : il nous apprend. Plus tard, il m’expliquera qu’il était fatigué… on l’a échappé belle ! Son livre lui ressemble : la mousse commence par s’adresser à nous :

« Si je m’adresse à vous, ce n’est pas par anthropomorphisme, c’est simplement une ruse pour que vous me compreniez un peu mieux, vous les humains si frustes et prétendument Homo sapiens sapiens. Quelle idée de s’appeler hommes sachants. Vous êtes vraiment l’espèce la plus prétentieuse de l’univers. »

J’applaudis.

Deux fois Sapiens,
pour faire bien,
se dire moderne,
se couper de ses racines,
mais ce n’est qu’esbroufe.
Bouffon, la mousse a raison.
Les vers de terre applaudissent.
Je m’écarte.

L’auteur continue sur un dialogue avec sa mère.

– Oui, Olivier ! C’est même une bibliothèque ! La nature est une bibliothèque de la vie ! Tout s’y conserve. La mémoire du vivant. Ici le temps ne passe pas… C’est l’éternité, tu comprends ? La mousse, elle a ce qui nous manque à nous. La lenteur. L’éternité. Le silence. C’est un ovni, quoi.

C’est toi l’ovni, maman !

Pour faire simple, les mousses sont des plantes sans racines, qui se reproduisent par spores comme les champignons et absorbent l’eau du brouillard et les nutriments de la pluie à travers leurs feuilles.

Nées du plancton marin, une hypothèse solide, sauf à croire que les mousses sont apparues par l’opération du Saint-Esprit, ou tombées du ciel, nous partageons avec elles un ancêtre commun : la cellule. Elles commencent à conquérir la terre ferme quand le ver de terre est encore un animal marin, c’est-à-dire un habitant des mers et non des terres. Cf. mon post du 15 juin dernier.

Quant à Olivier Liron, plutôt que de lui tirer le portrait, j’ai fait un copier-coller de celui fait par Jérôme Garcin, le journaliste et ancien animateur de la mythique émission de France Inter : Le Masque et la Plume.

Olivier Liron, est autiste Asperger, HPI (haut potentiel intellectuel. Il a un Q.I (quotient intellectuel) de 162. C’est un peu mieux qu’Einstein, 160, mais beaucoup moins que Garry Kasparov, 190. Il est normalien, agrégé d’espagnol et il connaît tous les vainqueurs du Tour de France depuis 1913. Il a remporté cinq fois de suite en 2012 le jeu télévisé Questions pour un super champion… Lire la suite.

Son livre est un petit bijou, niché dans un écrin de mousses… Du bel ouvrage, un récit où il mêle souvenirs personnels, références scientifiques et réflexions philosophiques. Une écriture débridée — pensez au cheval libéré de sa bride, libre, j’ai adoré. Merci, Olivier.

Pour finir sur moi, car on finit toujours par tout rapporter à soi, je lève le pied pendant quelques semaines, sans pour autant lever le camp ! J’avais annoncé quitter le secteur de l’édition après mon dernier ouvrage, Ne tirons plus la chasse, mais à moins de continuer à écrire pour les étoiles, me voilà obligé de remettre le pied à l’étrier à la demande du petit peuple des vers de terre.

Je sais, ils ont bon dos, mais qui va parler en leur nom ?
Pour ceux qui n’ont pas la réf, c’est par ici.
Parce qu’ils sont toujours mal traités par les animalistes et les naturalistes, une posture archaïque, et certains journalistes. Cf. mon post de dimanche dernier : Intox sur les vers de terre : un enjeu scientifique méconnu.

Le lombric terrestre, tout comme le chien, est victime de sa truffe ! Autrement dit, ils sont victimes de notre climat intellectuel. Et parmi les conneries qui circulent, je suis tombé sur une perle sur le site de Jardiland. Le cochon serait plus intelligent que le chien, notamment parce que les mamans cochons, les cochonnes (désolé), « chantent à leurs enfants pendant qu’ils se nourrissent ». Oui, vous avez bien lu : chantent !

Pour finir, je pousse plusieurs manuscrits — pour qu’ils n’amassent pas mousse ! Et parmi eux, un commencé en 2019 : Autopsie d’un retour toxique. A l’époque, plusieurs éditeurs m’avaient pris pour un hurluberlu quand je disais que la FNSEA travaillait déjà à la réintroduction des néonicotinoides avant leur interdiction. L’actualité vient de me donner raison. Je vais enfin pouvoir le terminer, reste plus qu’à trouver un éditeur à l’écoute de mon travail.

Je vous souhaite un bel été.

P.S. Petit conseil estival :
N’oubliez pas,
derrière ce geste anodin,
de tirer la chasse d’eau,
ce n’est ni l’eau ni vos pipis cacas
que vous faites disparaître,
mais une planète habitable.

1 réflexion sur “Éloge des mousses : un petit livre savant et poétique pour voir la vie en grand”

  1. Bonjour, merci pour votre courageux engagement ! Vers de terre, araignées,lion , otarie, tout ce qui est vivant a droit à notre respect et notre protection …..nous sommes très loin du compte………. et les truies chantant au moment de la tétée !!! que dire ! c’est Walt Disney ….. Je vous souhaite un bel été

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