L’idée d’un monde sans pesticides sous-entend qu’une agriculture sans produits est possible. Et que la seule bienveillance de la nature suffirait à s’en passer. En théorie, l’idée de faire confiance à la nature et aux écosystèmes est séduisante, mais qu’en est-il réellement ?
🌻 Publié le 1 octobre 2022 à 13:30
Saison 8 épisode 5 ⏰ Lecture 4 min.
Épisode précédent : La butte de permaculture ou le mythe de l’abondance
- Un consommateur berné
- Pourquoi utilise-t-on des pesticides en bio ?
- En complément, mon avis
- La sobriété comme solution
Texte publié le 23 sept. dans Marianne sous le titre : Les pesticides auraient dû rester l’exception, quand il n’y a plus d’autres solutions
UN CONSOMMATEUR BERNÉ
« Pour nous et pour la planète, #BioRéflexe », c’est le slogan initié cette année par L’Agence Bio, le groupement d’intérêt public en charge de son développement. Une campagne publicitaire à un million d’euros, pour rappeler aux consommateurs que le bio contribue à préserver la planète contrairement au non-bio ! Et le consommateur, qui a fait le choix de cette alimentation, croit en toute bonne foi qu’elle a été cultivée sans produits. Donc, qu’une agriculture sans pesticides est possible.
Mais voilà, à l’exemple du jambon blanc vendu avec la photo d’un cochon heureux de nous offrir sa cuisse, l’agriculture biologique n’est pas sans produits ! Et certains pesticides, comme la bouillie bordelaise ou les insecticides à base de pyréthrines, sont même communs aux 2 agricultures ! La seule différence est de ne pas être issus de la chimie de synthèse. Toutefois, en dehors de la « bouillie » qui est fortement toxique et rémanente, les pesticides homologués en bio ont une faible persistance dans l’environnement. Autrement dit, on ne les retrouve jamais dans l’eau du robinet.
POURQUOI UTILISE-T-ON DES PESTICIDES EN BIO ?
C’est logique, on ne gère pas 10 choux comme 10 000, ou 10 pieds de pommes de terre comme un champ de 10 hectares. Dans un potager, l’observation régulière suffit amplement à gérer les débordements parasitaires. Chimiques ou bio, tous les produits devraient y être proscrits, car ils sont contre-productifs. Contre-productifs, car en détruisant le « nuisible », on détruit au même titre son prédateur ainsi que tous les auxiliaires qui passaient dans le coin. Cet enchaînement morbide est la face sombre des pesticides.
Mais en grandes cultures, obligatoire pour nourrir une population qui a délaissé la terre, c’est actuellement moins de 1 % des Français qui nourrissent les autres, contre 80 % il y a un siècle. Depuis 1950, ce sont 2 millions de fermes parties en fumée, donc 2 millions de familles d’agriculteurs en moins. Et ce 1 % continue d’être réduit sous la pression des firmes de l’agroalimentaire, augmentant par ricochet la dépendance de l’agriculture aux produits. On peut parler d’une réelle fuite en avant, à une heure où les rendements agricoles ne cessent de baisser de manière inexpliquée depuis 10 ans. Une baisse qui va s’accentuer, 2022 nous donne un aperçu du menu. Lire la suite dans Marianne.
En complément, mon avis
Autant nous avons du mal à imaginer une agriculture sans tracteur, un monde sans voiture, sans moteur, sans électricité, sans eau chaude, sans internet ou sans smartphones, autant j’imagine que nous ne sortirons jamais des pesticides. Tous les petits pas en avant, pour en sortir, se sont toujours soldés par de grands pas en arrière. Enfin, nous n’en sortirons pas avant le retour de la bougie, car il y a une véritable addiction de l’agriculture à ces produits. N’oublions pas que lorsqu’ils n’existaient pas, et que la population mondiale était 5 fois moins importante, les sols fertiles, la biodiversité riche et les écosystèmes équilibrés, la famine faisait parfois des ravages quand le climat profitait aux ravageurs.
LA SOBRIÉTÉ comme solution ?
La solution à un cancer au stade 3, est-ce l’homéopathie et les tisanes de plantes ? Baisser son chauffage d’un degré ou éteindre la veilleuse de son téléviseur a-t-il un impact ? Oui, un impact homéopathique. En revanche, manger de la viande une fois par semaine au lieu de 2 fois par jour, ça, ça va avoir un réel impact, comme notre consommation de poissons sur la vie dans les océans.
La sobriété doit être autant alimentaire qu’énergétique, car vouloir un climat tempéré en permanence dans nos logements, bureaux ou voitures, de l’eau chaude ou de l’air froid pour conserver nos aliments, qu’une nourriture riche et variée à chaque repas dans son assiette, se paye directement sur le dos de la planète.
Liste des tribunes publiées dans Marianne en 2022
24 mars : Pourquoi l’ombre de la famine plane sur l’Europe
9 avril : Candidats, quelles sont vos mesures pour le ver de terre ?
16 juin : Sans cadre législatif, pas de transition agroécologie
2 aout : Le ver de terre est en danger, et nous regardons ailleurs
5 sept. : Le modèle agricole doit être revu pour faire face aux conditions climatiques
23 sept. : Les pesticides auraient dû rester l’exception